« L’ombre de la Girafe d’Eric Poindron, c’est son Age d’homme,vous savez, celui de Michel Leiris. Comme Eric Poindron est d’une exquise politesse dans la vie et dans ses livres, il fait semblant de sourire. Ou plus exactement,il sourit vraiment parce qu’il n’aime pas jouer de ses mélancolies de manière trop ostentatoire. Elles sont pourtant discrètement présentes dans ce portrait de l’artiste qui connaît le vrai goût du passage du temps. Les décennies s’égrènent dans une autobiographie fantasque à la recherche du père et du grand-père en Champagne. L’auteur se demande ce qu’il a bien pu faire des années d’une existence qui passent et repassent sous nos yeux, dans le désordre. Eric Poindron voudrait bien les collectionner, ces années, comme dans un cabinet de curiosités: et de vingt, et de trente, et de quarante, et de cinquante. Il nous les montre comme ça mais, évidemment, lui, il a la gorge serrée, l’air de rien. Prenez ce livre, si vous voulez comme un divertissement drôle, généreux, amical et érudit. Ce qu’il est, incontestablement. Pourtant, c’est surtout un homme qui se raconte, avec ses rêves et ses manières d’enchanteur qui sait varier ses métamorphoses, ses inquiétudes déguisées en chasse aux chimères.
Il n’a pas oublié pas la phrase de Cocteau: « Je suis un mensonge qui dit toujours la vérité. » Ou celle de Neruda: « J’avoue que j’ai vécu. » On vous parlait de Leiris. Leiris voulait trouver dans l’écriture, l’ombre de la corne du taureau. Eric Poindron, c’est celle du cou de la girafe. Ca a l’air plus léger, mais c’est bien d’ombre, dans les deux cas, qu’il s’agit. On vous en reparle bientôt, ailleurs, un peu plus en détail. On voulait juste, pour l’instant, vous dire notre plaisir, et notre émotion. »
Jérôme Leroy
L’Ombre de la girafe, un voyage au lon cou, Éric Poindron, éd. Bleu Autour, collection « Céladon »
Ce texte, non corrigé, pour l’ombre du Poindron…qui m’agrafât girafe quelques instants de grâce!
GIRAPHE
Pourquoi caméléopard ?
Comment zarafah fut girafe ?
Pourquoi les taches font long cou
en son ombre interminable ?
De quoi ce ruminant est-il le nom
de boue craquelée sous les rayons ?
Debout de tête de loin aux cils si noirs
ce nom de ne voir le monde d’en haut ?
Qui de girafon en ruminant adulte va
pour mourir si grande d’os longs.
Se coucher aux savanes de poussières
sous des vautours en manteaux d’ailes.
Allez sous la girafe dans l’ombre
qui nous fait si petit qu’elle donne
à l’humain une modestie inconnue.
Pousse l’étoile de ta hauteur lasse !
04 juillet 2018.
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