POÈTES VOUS-MÊMES !

 

 

Il dort le bonhomme
mais
Il est toujours vivant
Et ronfle de la poésie
A plein poumon – S –
A coup de clairon !
 
&&&
&
 
Sais-tu, ami, que, voilà deux ans, nous avons vendu chez Artcurial une édition originale de « Caligrammes », tirage de tête, avec envoi, correction d’adjectif sur le livre de la main d’Apollinaire et gravure original de Picasso.
Ledit livre est dans le catalogue d’Artcurial.
Je te raconterai ; et il faut que j’en fasse une petite histoire
 
& & &
&
 
Jeu de mains, jeux de poètes…
De la main d’Apollinaire, avec envoi à son ami René X, édition originale de 1918, exemplaire 239.
La main dans la main du poète, donc.
Émouvant.
Très.
Expertise ce presque jour chez Artcurial, non loin de la librairie du Théâtre du Rond-Point où trônent en majesté les Haïkus de mes comptoirs du trublion camarade Jean-Marie Gourio.
Attention, un poète peut – toujours – en cacher un autre


ETOILES & CO

Le directeur de la troupe :

Me voici donc revenu parmi vous
J’ai retrouvé ma troupe ardente
J’ai trouvé aussi une scène
Mais j’ai retrouvé avec douleur
L’art théâtral sans grandeur sans vertu
Qui tuait les longs soirs d’avant la guerre
Art calomniateur et délétère
Qui montrait le péché non le rédempteur

Puis le temps est venu le temps des hommes
J’ai fait la guerre ainsi que tous les hommes

C’était au temps où j’étais dans l’artillerie
Je commandais au front du nord ma batterie
Un soir que dans le ciel le regard des étoiles
Palpitait comme le regard des nouveau-nés
Mille fusées issues de là tranchée adverse
Réveillèrent soudain les canons ennemis

1

Je m’en souviens comme si cela s’était passé hier

J’entendais les départs mais non les arrivées
Lorsque de l’observatoire d’artillerie
Le trompette vint à cheval nous annoncer
Que le maréchal des logis qui pointait
Là-bas sur les lueurs des canons ennemis
L’alidade de triangle de visée faisait savoir
Que la portée de ces canons étaient si grande
Que l’on n’entendait plus aucun éclatement
Et tous mes canonniers attentifs à leurs postes
Annoncèrent que les étoiles s’éteignaient une à une
Puis l’on entendit de grands cris parmi toute l’armée

ILS ÉTEIGNENT LES ÉTOILES A COUPS DE CANON

6

Les étoiles mouraient dans ce beau ciel d’automne
Comme la mémoire s’éteint dans le cerveau
De ces pauvres vieillards qui tentent de se souvenir
Nous étions là mourant de la mort des étoiles
Et sur le front ténébreux aux livides lueurs
Nous ne savions plus que dire avec désespoir

ILS ONT MÊME ASSASSINÉ LES CONSTELLATIONS

3

Mais une grande voix venue d’un mégaphone
Dont le pavillon sortait
De je ne sais quel unanime poste de commandement
La voix du capitaine inconnu qui nous sauve toujours cria

IL EST GRAND TEMPS DE RALLUMER LES ÉTOILES

2

(…) La suite est toujours de Guillaume Apollinaire, poète fréquentable, et extrait du prologue de Les Mamelles de Tirésias.