ORTHOGRAVE & MANUSCRYPTE

L’imaginaire monastique a su inventer, par – ou avec – facétie, un démon particulier, appellé  Titivillus, et parfois « Tytyvillus », « Tutivillus », « Tutuvillus », afin d’excuser les erreurs et les fautes des moines calligraphes.
La répétitivité de la tâche des moines copistes occasionnait des erreurs et les mots étaient mutilés, déplacés, mal orthographiés ou tout simplement absents, et il fallait rappeler aux moines leur pêché d’inattention.
Ainsi ces derniers faisaient porter la responsabilité́ de leurs erreurs à ce petit diable, et se dédouanaient en écrivant au dos de leur copie : « Titivillus m’a fait faire cette faute. »
Il apparaît la première fois dans le « Tractatus de penitentia », écrit vers 1285 par John de Galles qui ajoute : « Quacque die mille / Vicibus sarcinat ille. »
Chaque jour, Titivillus devait trouver assez d’erreurs pour remplir son sac mille fois ; erreurs que le démon apportait au diable. Chaque erreur, comme un péché, était dûment enregistrée dans un livre face au nom du moine qui l’avait commise, afin qu’il soit énoncé le jour du Jugement dernier.
Et les moines de s’exclamer avant la moindre faute : « Puisse Titivillus ne pas remplir trop sa besace ! »
Même s’il disparaît peu à peu à la Renaissance, il demeurera longtemps dans l’imaginaire collectif puisque Shakespeare l’évoque dans le deuxième acte de son « Henri IV » et qu’au siècle dernier, le très sérieux dictionnaire de référence « The Oxford English Dictionary », mentionnait encore son nom dans une note de bas de page.
Extrait Marginalia & Curiosités, Eric Poindron, Éd. Les Venterniers
giphy